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Stéphanie, Infirmière Anesthésiste

Comment l’hôpital m’a tuée ou la désillusion d’une infirmière_épisode 1, 3ème partie

A propos de l’épisode précédent, certains d’entre vous se posent des questions sur les raisons du  licenciement. Afin d’écarter tout doute, je vais préciser certaines circonstances.

Dans la lettre envoyée en recommandé avec accusé de réception reçue un matin avant ma prise de poste l’après midi, qui m’annonçait mon licenciement pour insuffisance professionnelle, j’étais invitée à prendre connaissance de mon dossier lors d’un entretien avec la Directrice des Ressources Humaines, auquel je pouvais me rendre assistée de 2 personnes.

J’avais donc 21 ans. Je n’avais aucune idée de ce qui avait pu se passer. Je ne comprenais pas, d’autant qu’il me restait plusieurs jours à travailler. On laisserait donc travailler une infirmière en «insuffisance professionnelle », donc incompétente ?

Me sachant en période d’essai, je tente de trouver malgré tout un secours pour me libérer de la culpabilité que je ressentais et démontrer une injustice.

Pouvant me faire assister de deux personnes à cet entretien, j’ai entrepris d’alerter le syndicat pour qui mon histoire s’apparentait à la défense d’un cas d’école : quelle injustice de licencier sans réel  motif un soignant jeune diplômé dont l’hôpital a tant besoin!

J’ai également sollicité ma directrice d’école d’infirmières avec qui j’avais eu de bons contacts et qui, selon les faits exposés, subodorait une histoire ambiguë.

Voici les faits :

Peu de temps après mon arrivée dans son service, la cadre me convoque dans son bureau et me tient un discours dévastateur : rien de ce que je faisais n’étais bien, je n’étais pas l’infirmière, « la bonne infirmière », qu’elle souhaitait garder dans son équipe…

Malgré la violence de la situation, des propos, et la profonde déstabilisation engendrée, je décide de réagir. L’heure est grave, je mets au point une stratégie de défense.

Ma stratégie a été la suivante : je continuerai à faire de mon mieux et, de ma propre initiative, demanderai un entretien durant lequel elle ne pourrait que constater que j’avais toute ma place dans ce métier, et ainsi en témoigner.

C’est bien ainsi que les évènements se sont déroulés, (Dixit Hannibal de la série L’Agence Tout Risque : « J’adore quand un plan se déroule sans accroc »).

Elle aura même ces mots : « Techniquement, je n’ai rien à vous reprocher », mots qui seront repris par la directrice de l’école pour ma défense, justifiant que c’est la première des choses que l’on demande à une jeune diplômée.

Ce que je n’avais pu anticiper, imaginer, c’est que cette cadre avait monté un rapport négatif contre moi, constitué d’une somme de faits mineurs : des expressions maladroites dans des transmissions  écrites, des petits manquements qui ne relevaient pas toujours uniquement de ma responsabilité et qui ne justifiaient aucunement un licenciement, surtout avec mon statut de jeune diplômée.

C’était une surveillante, une cadre, la quarantaine passée, pas d’enfant, pas de mari, avec une coupe de cheveux « à la Mireille Mathieu », une coupe qu’elle avait depuis des années. Ce qui me surprenais dans sa coupe c’est sa rigidité, son immobilisme, il y avait là des milliards de brins de cheveux d’une certaine longueur, pas un ne bougeait !!! Pour moi, c’était un truc impossible, et pourtant j’ai les cheveux bien plus courts !

Même pour une cérémonie ou une soirée, je n’ai jamais réussi !!!

En fait, son équipe était ses cheveux !

Une équipe bien soumise, où on est tous d’accord, où on se tait tous. Tout est figé, surtout pas de changement, pas un bruit, une ambiance où le matin on connaît déjà le déroulement de la journée.

Jamais personne de cette équipe ne m’a parlé, ne m’a rapporté un seul des faits reprochés, ou tenté d’expliquer ; ou d’amorcer une discussion ou même devrais-je dire désamorcer une situation dont se dégageait de l’hostilité ; dont le fiel se déversait avec acharnement sur ma personne, en toute impunité.

Tout le monde voyait qu’elle était dans mon dos, sur mon dos, l’œil suspicieux prêt à capter la moindre erreur, lors de tout acte de soins. L’aiguille ou la pince ne doivent pas trembler et la concentration ne pas vaciller, tel était mon challenge !

Si je connais mon tempérament un brin, -« une mèche »- rebelle, je peux vous assurer que jeune diplômée, et dans cette ambiance je faisais tout pour être la « bonne infirmière ». Finalement même quand je me taisais ou que je tentais d’être comme tout le monde, de me fondre dans la masse ; rien n’allait ! J’en conclus que mes cheveux devaient me trahir…

Bien des fois j’ai pensé que je n’étais pas faite pour l’hôpital !!

Après ma réintégration, je vais passer plus d’un an dans le service de post réanimation médicale.

Dans ce service, on prend en charge les insuffisants respiratoires du département, des pathologies infectieuses, et toutes les maladies qui peuvent vous y amener; diabète, asthme, convulsions, hémorragie digestive… J’apprendrai les « trach » et les canules ! (trachéostomies, méningite, sida, sevrage de toxicomane…). Service riche dans ses spécialités, intéressant dans ses challenges mais un travail épuisant avec des horaires éreintants. A cette époque j’étais dans une équipe soudée, où l’on se réservait des moments conviviaux notamment ces « petits déj » ou l’on prenait le temps de se retrouver entre soignants.

Un nouvel événement va venir interrompre cette séquence. La hiérarchie continue la chasse au mauvais élément, la « pas – bonne – infirmière ». Je repasse d’un contrat de 6 mois à un contrat de 3 mois. Ecœurée par ces méthodes inhumaines, je décide finalement de quitter cet hôpital régional : je ne veux plus me battre contre des fous irréductibles.

Je suis bien trop jeune pour m’enfermer dans un statut de fonctionnaire.

… 

Stéphanie

Si vous n’avez pas encore lu les articles précédents, c’est ici => 

Comment l’hôpital m’a tuée ou la désillusion d’une infirmière_épisode 1, 1ère partie

Comment l’hôpital m’a tuée ou la désillusion d’une infirmière_épisode 1, 2ème partie

Stéphanie, Infirmière Anesthésiste
Stéphanie, Infirmière Anesthésiste

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